Le Bouclier vivant de la Tanzanie : comment des héros du quotidien (communautés, jeunes et vétérinaires) protègent une région contre la PPR
Dans les vastes paysages du sud et de l'ouest de la Tanzanie, à travers les régions de Ruvuma, Njombe, Katavi, Rukwa et Kigoma, une transformation silencieuse mais remarquable est en cours. Dans les collines vallonnées de Ruvuma, sous les forêts denses de Kigoma et à travers les vastes plaines dorées de Katavi et Rukwa, une histoire extraordinaire prend forme, qui remodèle discrètement mais profondément la lutte de la région contre la peste des petits ruminants (PPR). Pendant des années, ces régions sont restées épargnées par la maladie. Mais leur importance dépasse largement leurs frontières.
Ces zones sont devenues l'un des remparts régionaux les plus solides d'Afrique orientale et australe : un cordon sanitaire vivant où les communautés, les équipes de surveillance et les services vétérinaires forment collectivement un bouclier protecteur qui protège des millions d'animaux et stabilise les moyens de subsistance des familles dans toute la région de la SADC. Leur statut indemne de maladie n'est pas seulement une réussite technique, c'est aussi un témoignage de discipline, de partenariat et de résilience.
Ce qui rend cette transformation exceptionnelle, ce n'est pas simplement l'absence de PPR, mais les personnes qui sont à l'origine de ce succès. Ce sont les jeunes vaccinateurs qui parcourent de longues distances avec des glacières sur le dos, les femmes leaders qui rassemblent leurs voisins sous les manguiers pour dissiper les rumeurs et encourager la vaccination, les vétérinaires qui suivent les mouvements du bétail le long des chemins poussiéreux à la frontière, et les anciens du village qui prêtent leur voix pour lutter contre la désinformation avec sagesse et autorité.
Cette ceinture exempte de PPR joue un rôle régional essentiel en limitant la transmission du virus vers le sud, dans les pays voisins de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC). De nombreux pays de la SADC restent exempts de PPR, et le maintien de ce statut est vital pour le commerce régional du bétail, la sécurité alimentaire et les efforts d'éradication de la maladie. Le maintien par la Tanzanie d'un cordon sanitaire, le renforcement de la surveillance des frontières et les campagnes de vaccination ciblées dans les zones à haut risque contribuent collectivement à préserver cette zone tampon. En conséquence, les régions du sud et de l'ouest fonctionnent non seulement comme des zones protégées au niveau national, mais aussi comme une ligne de défense de premier plan qui soutient la stratégie plus large de la SADC pour la prévention et l'éradication éventuelle de la PPR.
Les campagnes de vaccination contribuent à réduire le risque de propagation transfrontalière de la PPR en créant une immunité collective dans les régions à haut risque et frontalières, bloquant ainsi la transmission du virus parmi les petits ruminants sensibles. Lorsqu'une proportion suffisante de chèvres et de moutons est vaccinée, le virus de la PPR ne peut pas circuler efficacement, ce qui réduit le risque que des animaux infectés traversent les frontières. La vaccination protège également les animaux dans les couloirs commerciaux et les routes pastorales où les mouvements transfrontaliers sont fréquents. Associées à la surveillance et au contrôle des mouvements, ces campagnes forment une zone tampon protectrice qui empêche les épidémies dans un pays de se propager aux États voisins, soutenant ainsi les efforts régionaux de prévention et d'éradication de la PPR. Cette réussite est inestimable pour le commerce régional du bétail en Afrique orientale et australe, car la Tanzanie est la source de la plupart du bétail commercialisé dans la région.
Les jeunes du secteur informel formés à la santé animale ont joué un rôle essentiel dans les campagnes de vaccination contre la PPR en Tanzanie, en apportant un soutien pratique pour l'administration des vaccins et la mobilisation des communautés. De même, les dirigeants des associations d'éleveurs et les petits éleveurs de ruminants, dont la plupart sont des femmes et des jeunes, participent activement à des forums de sensibilisation au niveau des villages, des quartiers, des districts, des régions et du pays. Ces plateformes facilitent le partage des connaissances, en particulier sur les meilleures pratiques d'élevage, ce qui renforce l'engagement des communautés et le respect des calendriers de vaccination. Leur implication a renforcé la prestation des services vétérinaires locaux, amélioré la notification des cas suspects et favorisé une gestion durable du bétail et la lutte contre la désinformation sur la vaccination et l'identification.
Dans toute la Tanzanie, les éleveurs, les agents vétérinaires de district et les responsables des associations d'éleveuses ont souvent exprimé leur profonde gratitude dans les médias en kiswahili pour les services de vaccination subventionnés et d'identification gratuite offerts par le gouvernement. Dans le district de Ruangwa, le directeur de district par intérim, George Mbesigwe, a publiquement remercié le gouvernement d'avoir fourni gratuitement des doses de vaccins pour lutter contre la PPR et la CBPP, et d'avoir distribué gratuitement des marques auriculaires d'identification.
Les éleveurs membres de l'Association des éleveurs de Tanzanie (CCWT) ont salué la réduction du prix des vaccins, qui est passé de 1 000 TSh par dose pour les bovins à seulement 500 TSh, et la mise à disposition de vaccins pour les chèvres et les moutons à 300 TSh, tandis que les poulets sont vaccinés gratuitement.
Ces témoignages diffusés dans les forums régionaux et les médias locaux soulignent la manière dont la campagne aide les éleveurs à réduire les pertes dues aux maladies, à augmenter leur productivité et à améliorer leurs moyens de subsistance. Les éleveuses, en particulier les éleveuses de poulets, ont également salué la vaccination gratuite, soulignant qu'elle favorise leur autonomisation économique. Parallèlement, les vétérinaires applaudissent l'utilisation de marques auriculaires électroniques dans le cadre du programme afin d'améliorer la traçabilité du bétail et de faciliter l'accès au marché.
Plusieurs réunions ont été organisées, dont deux réunions nationales de sensibilisation, qui ont été suivies de sessions de sensibilisation au niveau régional, départemental, communal et villageois. En outre, la Direction des services vétérinaires, en collaboration avec les services vétérinaires zonaux, a participé à une tournée médiatique coordonnée par l'Unité de communication du gouvernement (GCU), visitant tous les principaux médias du pays. La GCU a également partagé les enregistrements de ces rencontres sur diverses plateformes de médias sociaux afin de toucher un public plus large. Au niveau local, des bannières et des affiches ont été placées dans les centres de vaccination de chaque village afin d'informer et de guider les éleveurs, garantissant ainsi une large sensibilisation et participation de la communauté aux campagnes de vaccination et d'identification.
Les principaux défis rencontrés ont été un budget limité en raison d'erreurs de calcul dans l'estimation du coût des différentes activités, ainsi que des difficultés à gérer la désinformation liée à la campagne de vaccination.
Pour remédier à ces problèmes, la direction a demandé un budget supplémentaire afin de couvrir les dépenses imprévues et de garantir que toutes les activités prévues puissent se dérouler sans interruption. Parallèlement, la Direction des services vétérinaires et les services vétérinaires régionaux ont activement utilisé les médias, notamment la radio, la télévision et les réseaux sociaux, par l'intermédiaire de l'Unité de communication du gouvernement, afin de lutter contre la désinformation, de clarifier les calendriers de vaccination et de fournir des conseils précis aux éleveurs. Ces efforts combinés ont contribué à maintenir la confiance de la communauté, à améliorer la participation et à garantir le succès de la campagne dans toutes les régions.
Plusieurs enseignements peuvent être tirés pour améliorer les futures campagnes de vaccination et d'identification du bétail. Premièrement, une budgétisation précise et des projections de coûts détaillées sont essentielles pour éviter les déficits de financement et garantir l'approvisionnement en temps voulu en vaccins et en fournitures. Deuxièmement, une implication proactive de la communauté, notamment par le biais de réunions de sensibilisation régulières, le recours aux leaders locaux et des campagnes médiatiques ciblées, contribue à instaurer la confiance, à réduire la désinformation et à accroître la participation.
Troisièmement, la formation et l'implication des jeunes, des femmes et des agents de santé animale du secteur informel renforcent les capacités locales et garantissent une prestation de services efficace. Quatrièmement, un suivi et une évaluation continus pendant la campagne permettent d'identifier rapidement les défis et les mesures correctives. Enfin, l'intégration d'outils de communication modernes, la tenue de registres clairs et la collaboration avec les autorités régionales et départementales peuvent améliorer la coordination, la couverture et l'efficacité globale des futures campagnes.
L'UA-BIRA s'efforce activement de remédier à ces lacunes en renforçant les capacités de surveillance et de diagnostic des maladies pour la lutte contre la PPR. Cela inclut l'examen national réussi de la stratégie d'éradication de la PPR en Tanzanie.
Ces enseignements renforcent non seulement la stratégie nationale de la Tanzanie, mais offrent également un modèle aux autres pays qui souhaitent renforcer leurs systèmes de lutte contre la PPR.
L'expérience de la Tanzanie montre que l'éradication de la PPR n'est pas seulement une opération vétérinaire, mais un mouvement communautaire.
Des jeunes qui vaccinent les chèvres dans les villages reculés aux femmes qui militent pour une meilleure gestion des troupeaux, en passant par les tournées médiatiques nationales et la surveillance des frontières, toutes les couches de la société contribuent à renforcer la protection régionale contre la PPR.
Il s'agit de protéger les moyens de subsistance, d'améliorer la sécurité alimentaire régionale et de franchir une étape cruciale vers la réalisation de l'objectif africain d'éradication totale de la PPR d'ici 2030.